Publié : 23 mai 2005

Réunir des arguments : un citoyen de Mervelier s’exprime

L’avis de D.L. citoyen de Mervelier, présenté par un groupe de citoyen à l’assemblée communale.



au Conseil communal de 2827 Mervelier

Mervelier, le 2 mai 2005

Projet ILS 34 de survol du Val Terbi à basse altitude : consultation

Monsieur le Maire,

Mesdames les Conseillères,

Messieurs les Conseillers,

Dans la procédure de consultation liée au projet ILS34 de l’aéroport de Bâle-Mulhouse, nous formulons notre opposition au projet des autorités fédérales et des autorités françaises de l’aviation civile (Office Fédérale de l’Aviation Civile, ci-après OFAC et Division Générale de l’Aviation Civile française, ci-après DGAC)de faire survoler le Val Terbi par des avions de ligne en phase d’approche d’atterrissage à l’aéroport de Bâle-Mulhouse.

Nous demandons par ailleurs instamment aux autorités communales de Mervelier de s’unir à toutes les communes touchées par le projet et d’intervenir auprès des autorités cantonales afin d’éviter à tout prix la réalisation de ce projet.

Les trois motifs avancés par la DGAC pour appliquer une procédure d’approche aux instruments sur la piste 34 de l’aéroport de Bâle-Mulhouse, à savoir

  1. la sécurité des passagers,
  2. l’aspect financier et
  3. la réduction des nuisances aux riverains de l’aéroport

sont intolérables dans leur principe et dans la méthode de mise en ?uvre.


Arguments :


Sécurité

1. Le principal argument avancé, et forcément louable, est la sécurité. Celle des passagers sera augmentée d’un facteur 5 (étude anglaise de la Flight Safety Foundation), alors que celles des habitants des régions nouvellement survolées sera réduite d’un facteur 46.
Il y a donc échange d’une probabilité d’accident (déjà très faible) contre des atteintes bien réelles et permanentes à la santé des populations (atteintes dues au bruit et à la pollution de l’air). Dans les faits, c’est un déplacement du risque d’une population (les passagers) vers une autre (les habitants des régions nouvellement survolées), et non une augmentation réelle et globale de la sécurité.

2. L’approche aux instruments (ILS - Instruments Landing System) est une procédure d’approche et non une procédure d’atterrissage de sécurité. Le système de sécurité d’atterrissage en cas de mauvais temps ou pour les atterrissages d’urgence se nomme GCA (ground-controlled approach). Aucune indication quant à l’installation d’un tel système n’est mentionnée dans le projet. L’ILS est surtout utilisé pour mieux gérer le trafic, notamment lorsque celui-ci est important. Les risques liés à l’ILS sont une distorsion possible des rayons radios par des constructions ou des montagnes proches. L’aéroport de Nice en est d’ailleurs dépourvu pour cette raison. L’ILS34 provoque le survol d’une région montagneuse (le Jura) ! Il en résulte un accroissement évident des risques. Les derniers accidents en Suisse ont eu lieu aux abords d’aéroport équipés d’ILS.


Examinons maintenant les intérêts économiques


Finances


3. La DGAC (voir son site Internet) informe des raisons économiques : le déroutage des avions en cas de très mauvais temps coûte de l’argent aux compagnies aériennes et par conséquent à l’aéroport (perte des rentrées financières liées aux mouvements).

Toujours selon la DGAC, les augmentations du trafic seront mieux gérées grâce à l’ILS qui permet la séparation améliorée entre les arrivées et les départs (augmentation prévu du trafic, 2.5 millions de passagers en 2003 / 4,3 millions à moyen terme / 6,5 millions à long terme = 2.6 X la valeur initiale). L’argument économique est donc confirmé par les promoteurs du projet. Il est inacceptable qu’une augmentation des profits économiques de compagnies privées soient réalisés aux dépens de populations indépendantes. Un article du Basler Zeitung estime les pertes en valeurs immobilières à 750 millions pour les populations touchées.
Il va de soi qu’en cas de survol de Mervelier, une diminution des valeurs officielles de nos biens immobiliers sera exigée, avec encouragement à nos concitoyens de faire de même. Elle entraînerait une perte proportionnelle des rentrées fiscales.


Nuisances


4. Le déplacement des nuisances des populations riveraines vers des populations éloignées est également inacceptable. L’aéroport existant depuis plus de 50 ans, on peut supposer que la très grande majorité des riverains ont volontairement choisis de s’installer dans sa proximité, surtout si l’on considère, selon les indications du DGAC, qu’une forte augmentation de l’urbanisation de la zone sud à été constatée ces dernières années. Ils en retirent les avantages qui sont liés à cette proximité (accès aux zones urbaines, coûts des terrains réduits, etc.).

L’aéroport profite aux populations qui peuvent s’y rendre en moins d’une heure de voiture (indication de la DGAC), ce qui n’est pas le cas des habitants du Val Terbi. Il est logique que ceux qui profitent d’un avantage en subissent proportionnellement les nuisances.

La zone d’approche doit donc impérativement être réduite et rester hors des limites du Val Terbi.

5. La population du Val Terbi subit une lourde charge fiscale, doit entreprendre de longs déplacements pour se rendre au travail ou aux activités régionales, et n’a pour compensation que le calme retrouvé lorsqu’elle rentre chez elle et s’installe sur ses terrasses. Lui enlever ce dernier élément qui la maintient sur sa terre est prononcer l’arrêt de mort de tout potentiel de développement dans la vallée. Les nuisances actuelles liées à la circulation automobile le week-end dépassent déjà la limite du tolérable.

Des nuisances supplémentaires tout au long de la belle saison seraient insupportables. Deux tiers des survols prévus seraient effectués entre avril et août, l’après-midi et le soir.

Le total de 4600 vols par an à l’introduction du système, multiplié par l’augmentation prévue de 2.6X, représente un total de 12’000 vols ! La gêne actuelle par les survols à haute altitude est déjà importante.

6. Le fait de faire faire demi-tour aux avions (arrivée par l’ouest ou le nord, puis descendre faire demi-tour au sud de Mervelier) pour une approche par le sud prolonge encore le temps de survol (d’autant plus si l’avion arrive du sud) et donc la pollution et les nuisances liées. On peut compter sur une augmentation prévisible des consultations médicales pour problèmes respiratoires liées à l’augmentation de la pollution (voir par exemple dans le site de l’OFEFP la rubrique intitulée ?’la pollution remplit...les cabinets des médecins’’).

La santé doit être absolument prioritaire sur toutes les autres considérations, qu’elles soit économiques ou de sécurité d’une population restreinte, dont le risque est infime (le danger au travail tue une personne par jour en Suisse et en envoie un nombre incalculable chez les médecins).


Procédure


7. La présentation du projet, faite à Courroux le 26 avril 2005, montre des lacunes en matière de droit, de procédure et d’informations. D’une part, l’ordonnance sur la sauvegarde de la souveraineté de l’espace aérien (OSS - RS 748.111.1) devrait inciter l’OFAC et les Autorités fédérales de protection de la population à octroyer un droit de recours aux citoyens suisses, en Suisse. On peut attendre de ces autorités qu’elles s’appliquent à défendre les intérêts la population suisse en priorité.

8. Aucune indication quant aux nuisances sonores n’a été donnée, à part qu’elles ne dépasseraient pas les limites de l’ordonnance sur la protection contre le bruit (OPB - RS 814.41). Cette dernière ordonnance donne des valeurs allant de 55 à 70 dB(A) selon les degrés de sensibilité (art.43). On peut y voir une volonté de rétention d’information dans un but particulier, d’autant que la valeur moyenne est déjà très élevée (62.5dB(A)).

Aucun cadastre de bruit (art 37) n’était disponible. La seule information était la similitude du bruit à une conversation, ce qui équivaut selon le tableau de l’OFEFP à environ 60 dB(A). Cette valeur est très importante et aura des incidences sur la santé. Les enfants seront particulièrement touchés.

9. Aucune étude d’impact n’a été présentée conformément à l’ordonnance relative à l’étude d’impact sur l’environnement (OEIE -RS814.011). Selon l’art. 2, al. 1 lettre a, il y a soumission à une EIE (Etude d’Impact sur l’Environnement) lorsque la modification d’installations existantes modifie notablement son mode d’exploitation. Sont soumis à une EIE, selon le point 14.2 de l’annexe, les champs d’aviation avec plus de 15000 mouvements par an (Bâle-Mulhouse = 88000 mouvements /an). Le résultat de l’EIE doit permettre à l’autorité compétente de se déterminer sur l’autorisation ou non du projet. Le fait que l’OFAC aie donné son accord préalable sans EIE démontre un flagrant vice de forme, et donc la défense, une fois de plus, d’intérêts particuliers avant les intérêts généraux. Conformément à l’article 8 al. 3 OEIE, les atteintes sensibles à l’environnement du projet ILS34 aurait dû conduire les requérants à soumettre un dossier à l’autorité compétente au sens de l’article 14 OEIE, qui aurait du être communiqué au service spécialisé de la protection de l’environnement au sens de l’art. 12 OEIE pour évaluation. Aucune observation de ces services et autorités n’a été communiquée au public.

10. Droit constitutionnel : Selon l’article 74 de la Constitution fédérale (RS101), 1La Confédération légifère sur la protection de l’être humain et de son environnement naturel contre les atteintes nuisibles ou incommodantes. 2Elle veille à prévenir ces atteintes. Les frais de prévention et de réparation sont à la charge de ceux qui les causent (principe du pollueur - payeur).
Il ressort de ce droit de base qu’en cas de mise en ?uvre du projet tel que présenté,
le principe constitutionnel du pollueur - payeur sera invoqué (jusqu’au tribunal fédéral si nécessaire) pour obtenir les dédommagements correspondants aux pertes financières et aux atteintes à la santé subies.


Modifications


11. Nous prions instamment les autorités communales et cantonales de tout mettre en ?uvre pour obtenir une modification du projet, et de faire en sorte que les populations ne subissent pas des nuisances dont elles ne sont pas la cause.

Différentes voies doivent être explorées : des contraintes techniques peuvent être imposées aux fournisseurs des équipements afin que les approches avant atterrissage puissent se faire par des zones industrialisées, et donc de réduire les nuisances aux zones rurales éloignées.

L’installation d’un deuxième ILS pour une approche par l’ouest (voir point 6 ci-dessus) combinée avec l’ILS34 prévu réduirait la zone d’impact.

Le virage aux instruments à l’approche de l’aéroport n’a jamais été évoqué mais doit être de l’ordre du possible dans l’état actuel de la technique. Au besoin, un autre fournisseur d’ILS doit être sollicité si le fournisseur actuel n’est pas en mesure de donner satisfaction sur ce point. Dans tous les cas, la zone de nuisance, dans le cadre d’un développement durable, doit être restreinte et non pas étendue.

La sécurité des passagers et les finances des compagnies aériennes profitant principalement du projet, une taxe d’aéroport de quelques francs destinée spécifiquement à ces améliorations permettrait une modification éventuelle de la ligne d’atterrissage ou un aménagement de la piste ouest-est ? Aucune proposition dans ce sens n’a jusqu’à aujourd’hui été présentée.

Il est primordial que les autorités fassent tout ce qui est en leur pouvoir pour faire annuler ou modifier le projet ILS34.

Notez encore que la commune de Binningen (Bâle) demande à toutes les communes de se battre avec toute l’énergie possible contre ce projet.

Nous ne sommes donc pas seuls ! Enfin, le fait que Mervelier, contrairement à Vicques ou Corban, soit située dans la zone de guidage radar dans laquelle 90% des avions seront conduits, doit être un motif supplémentaire de lutter contre ce projet.

Nous vous invitons donc, Monsieur le Maire, Mesdames les Conseillères et Messieurs les Conseillers, à prendre contact avec les autres communes du Val Terbi, mais aussi du reste du Jura et de Soleure voisin, pour tout mettre en ?uvre afin de sauver des valeurs aussi fondamentales que la santé et le bien-être des habitants de ce coin de pays. Nous vous prions également de transmettre notre requête aux Autorités cantonales.

Nous vous en remercions par avance et sommes disponibles pour vous épauler dans les actions à venir.

Dans l’attente d’une issue favorable à toute la population de notre village, du Jura et de la région, nous vous adressons, Monsieur le Maire, Mesdames les Conseillères et Messieurs les Conseillers, nos salutations les meilleures.

Post-scriptum

Merci de nous faire parvenir vos propositions de lettres et vos arguments. Envoyez-les à Pro Val Terbi